Article #2 – ‘Enter the Matrix’

Devenir traducteur indépendant à titre principal et s’écarter du système suivi par la majorité de la population (même s’il y a apparemment près de 700 000 indépendants à titre principal en Belgique, le chiffre m’a impressionné, sur le coup), c’est un peu comme entrer dans la matrice. Bon, ceux et celles qui me connaissent savent que Keanu et moi n’avons pas exactement ce qu’on pourrait appeler un air de ressemblance, mais là n’est pas l’important.

Au début d’une carrière professionnelle en Belgique, il est normal voire conseillé (ou fortement recommandé par la pression sociale) d’essayer de trouver un ‘bon boulot’. Tu es jeune, tu as une expérience limitée et ton compte en banque te rappelle souvent que tu n’étais pas le dernier gagnant de l’Euromillions. Bref, tu essayes de t’en sortir et tu prends ce qui passe. Normal.

Pilule rouge ou pilule bleue ?

Viennent ensuite les premières failles. À peu près tous les travailleurs (employés, ouvriers, tous les gens avec un patron/une patronne) que je connais ont quelque chose à redire sur la manière dont est gérée l’entreprise pour laquelle ils travaillent. Et je ne parle pas uniquement des potins entre collègues, mais bien de l’orientation et la vision générale de l’entreprise. Parfois, c’est assez logique : un employé européen ne comprendra pas toujours la vision qu’une maison-mère américaine essaye d’imposer pour ses filiales. Pourtant, des gens très motivés ont passé des jours outre-Atlantique à concevoir ce ’10-step plan’ que chaque filiale est censée appliquer sur son marché.

Même à une échelle plus ‘locale’, dans une entreprise de plus petite taille, les employés ont très souvent une vision personnelle de ce que pourrait être l’orientation de leur entreprise. « Moi, si j’étais le patron (ou la patronne), je ferais ceci ou cela. » Si vous n’avez jamais pensé/prononcé cette phrase, ou équivalent, faites tout ce qui est en votre pouvoir pour conserver votre emploi actuel, cela montre que vous adhérez à l’orientation prise par votre employeur et vous devez être très épanoui(e) professionnellement.

Pour les autres, vous avez sans doute déjà observé une faille ou l’autre dans votre matrice. Peut-être même avez-vous déjà été tenté(e) d’explorer la matrice par vous-même et vous lancer comme indépendant(e) pour donner à votre univers professionnel la forme que vous désirez. Ça a été mon cas il y a maintenant trois gros mois et je dois dire que le lapin blanc rencontré dans le gouffre a été plutôt sympa avec moi jusqu’ici (entendez que ces trois premiers mois se sont relativement bien déroulés) et Mirrors Translations a eu la chance de recevoir des demandes de divers clients. Je ne regrette donc pas d’avoir pris la pilule rouge qui m’a fait sortir du système et j’aurais tendance à encourager les gens autour de moi à également tenter leur chance, quel que soit leur domaine et même si la Belgique n’est pas vraiment l’environnement le plus encourageant pour les indépendants.

La Belgique, grosse productrice de pilules bleues

Quand tu es indépendant en Belgique, tu as parfois l’impression d’avoir attrapé une curieuse maladie, un peu contagieuse, mais pas trop. Si tu dis à un(e) Belge que tu viens de te lancer comme indépendant, cette personne va souvent prendre un pas de recul, te regarder d’un air inquiet et te demander si ça va. Mentionne la même chose devant un(e) Américain(e), il va te taper sur l’épaule et te féliciter. Je ne vais pas prolonger la comparaison, vous avez compris que l’état d’esprit est différent. Le monde des indépendants en Belgique est peu connu et souvent résumé comme étant ‘une option très taxée qui coûte cher’.

Et c’est vrai que le statut n’est pas donné. Comme beaucoup, je pensais que le statut d’indépendant (cotisations) tournerait autour des 700 euros par trimestre. Mais il y a une grosse nuance. Cela revient à peu près à 700 euros (689, en fait) si vous déclarez des revenus nets par mois de 1000 euros. Donc si vous gagnez 1000 euros nets par mois. Si vous gagnez un peu plus (ce que je souhaite à tous les indépendants), le montant des cotisations grimpe assez vite, sans être exponentiel quand même. Exemple : pour 17 500 euros nets déclarés sur un an (donc +- 1458 euros/mois), vous êtes déjà à 924,23 euros dus pour vos cotisations, pour un seul trimestre. Ce qui n’est pas rien.

Je n’aborde pas encore les impôts réclamés par l’État mais en bref et très personnellement, je m’attends à devoir rendre 50 % des montants reçus. Ça sera sans doute le sujet d’un prochain article car ça va potentiellement être douloureux. L’indépendance a donc un prix en Belgique. Mais à nouveau, je tiens à souligner que pour le moment (je touche tout le bois que je peux), les avantages dépassent largement les inconvénients et je parle souvent de cette décision de me lancer comme indépendant comme de la meilleure décision de ma (jeune) carrière professionnelle.

Entendons-nous bien, je ne fais pas l’apologie sans aucune réserve du statut d’indépendant. Il faut me comprendre aussi, c’est tout nouveau pour moi et pour le moment, je trouve ça génial. Si je dois commencer à rechercher un boulot d’employé (ou autre) à plus ou moins court terme, je regretterai sans doute amèrement d’avoir écrit ces lignes. Si vous avez une autre vision des choses ou trouvez cet article non-représentatif (je ne représente que moi, on est d’accord), merci de me laisser un petit commentaire, je ne suis jamais contre un petit débat :-).

En vous remerciant !

S.

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